Ses débuts comme compositeur
Carl Orff est de plus en plus attiré par le théâtre, notamment par les œuvres de Shakespeare, mais également par la tragédie Grecque antique. Il est « fortement influencé par le caractère magique, rituel, incantatoire des musiques dites primitives et par la richesse des musiques archaïques des grandes civilisations »[1].
De retour à Munich, il se voue à la composition ainsi qu’à l’analyse d’œuvres du 16° et 17° siècle. Il travaille à l’adaptation de : « L’Orfeo » de Monteverdi pour le théâtre moderne.
A cette époque, l’expressionnisme Allemand est très actif. Carl Orff, sans en être le chef de file, y prend malgré tout une part importante. Les idées de Jaques Dalcroze à propos de la danse et du mouvement trouvent un écho très favorable dans les milieux artistiques. L’expression par le corps devient plus naturelle, moins rigide que celle imposée par la rigueur du classique
En 1923, Orff rencontre à Munich Dorothée Günther, une artiste peintre qui participe à la mise en scène de « L’Orfeo » et dont il partagera la vie quelques années.
Dorothée Günther qui a suivi de près les travaux de Dalcroze et de Laban envisage de créer une école dans laquelle des jeunes de tous les milieux pourraient s’initier à la gymnastique, la danse rythmique et la danse d’expression.
Carl Orff s’enthousiasme pour ce projet novateur et propose d’apporter un volet musical à l’enseignement du mouvement. Ces deux disciplines deviennent alors interactives dans un enrichissement mutuel.
L’école Günther
En 1924, l’école Günther initie ses activités à Munich dans un pavillon toujours visible aujourd’hui, dans lequel se déroulent les activités du « Orff Zentrum ». C’est en ce lieu que va naître le concept de : « Musique élémentaire ». Dans cette nouvelle pédagogie, une place centrale est accordée au travail de groupe, au mouvement, au rythme ainsi qu’à l’improvisation.
Les années 1924/1925 voient l’arrivée à l’école Günther de Maja Lex et Gunhild Keetman.
Maja Lex, d’abord étudiante, prendra ensuite la direction de la formation corporelle de l’école.
Gunhild Keetman, également étudiante au début, assumera la tâche d’approfondir la technique instrumentale et d’écrire les premières pièces. Ainsi que nous venons de le voir, cette pédagogie de la musique et du mouvement n’est pas l’œuvre d’un seul homme mais d’une équipe.
En 1934, dans le cadre des jeux olympiques, il est demandé à Orff de composer la musique du défilé des enfants. Cette pièce qu’il composera en collaboration avec Keetman et Lex aura pour titre « Parade et ronde des enfants et des jeunes filles » et connaîtra par la suite un succès insoupçonné à l’époque.
Pour des raisons politiques, l’école Günther cesse ses activités en 1937. Orff, Lex, Keetman et Günther se perdent de vue.
Nouvelles œuvres
La même année Carl Orff présente un opéra en 3 actes intitulé : « Carmina Burana ». De ses œuvres, celle-ci restera la plus connue. Il est à noter qu’à ce moment il détruira une grande partie de ses œuvres antérieures.
D’autres œuvres suivront, notamment pour le théâtre, comme « La lune, un petit théâtre du monde », « L’astucieuse », « Songes d’une nuit d’été », « La bernauerine, une pièce bavaroise », « Astutuli », « Antigonae » etc..
Sa participation à la partie musicale des jeux olympiques de Berlin et les représentations données durant ces années troublées lui vaudront par la suite de la méfiance voire de l’hostilité, surtout à l’étranger.
Probablement son erreur aura été de demeurer uniquement dans un rôle de compositeur et de ne pas prendre une position plus tranchée face au régime totalitaire de l’époque. Néanmoins en étudiant de plus près le livret de « Carmina Burana » on remarque des textes qu’il fallait oser présenter en pleine période fasciste :
« Sur le siège de la Fortune,
j’étais assis en haut,
des fleurs bariolées de la prospérité
couronné ;
mais tout prospère que je fus,
choyé et béni,
du sommet alors je chus,
dépouillé de la gloire.
La roue de la Fortune a tourné ;
je descends, déchu ;
un autre est porté vers le haut ;
démesurément exalté,
le roi siège au faîte
qu’il prenne garde de tomber!
car sous l’axe nous lisons :
Hécube reine. »[2]
Composer pour les enfants
En 1948, La radio bavaroise découvre l’enregistrement de la « Parade et ronde des enfants et des jeunes filles ». Anne-Marie Schrambeck, alors directrice de la radio scolaire, demande à Carl Orff de composer de nouvelles pièces que les enfants pourraient interpréter eux-mêmes. Orff, occupé à l’écriture d’Antigone, accepte néanmoins le défi d’autant que l’expérience de l’école Günther s’était interrompue prématurément.
Les émissions qu’il anime en compagnie de Gunhild Keetman, conçus sous forme de d’exemples à reproduire puis à développer, rencontrent un succès qui dépasse toutes les espérances.